La problématique de l’industrialisation dans les mines de bauxite en Guinée (Par Boubacar Nabé)

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(Guinée Eco) – En Guinée, l’exploitation minière a connu de fortes croissances ces dernières années grâce à un code minier attrayant et une stabilité politique. Le pays est désormais un géant de la production bauxitique mondiale avec près de ¾ des réserves mondiales.

La Guinée a exporté 80 millions de tonnes en 2022, soit un chiffre d’affaires de 3.2 milliards de dollars. Une tonne de bauxite coûte environ 40 $. L’alumine avoisine les 700 $ alors que celle de l’aluminium culmine à 2400 $ ! Les réserves bauxitiques sont estimées à 40 milliards de tonnes, soit 400 ans d’exploitation pour une production annuelle plafonnée à 100 millions de tonnes. Les principales sociétés sont : SMB, CBG, CHALCO, ELITE MINING, ALUFER COBAD, RUSAL…

Il faut cinq tonnes de bauxite pour produire deux tonnes d’alumine après transformation et une tonne d’aluminium par électrolyse. Les proportions en valeur ajoutée sont énormes avec sept fois pour l’alumine et quinze fois pour l’aluminium en comparant au prix de la bauxite brute.

En transformant 50 millions de tonnes de bauxite en aluminium, la Guinée ferait une vente de 28 milliards de dollars contre seulement 2 milliards sans cette transformation. Les besoins en électricité sont très grands pour assurer cette création de valeur ajoutée.

L’Australie, la Chine et la Guinée assurent 80% de la production mondiale qui est de l’ordre de 400 millions de tonnes en 2022. La production mondiale d’oxyde d’aluminium est de 174 millions de tonnes dont la Chine seule produit la moitié, l’Australie 21 millions de tonnes et le Brésil 11 millions de tonnes.

En Afrique, on trouve des raffineries d’aluminium uniquement dans quatre pays : Afrique du Sud, Le Ghana, le Cameroun et la Mozambique. La Guinée étant le deuxième plus grand producteur de bauxite, elle doit vraiment se positionner pour la transformation afin de doubler son Produit Intérieur Brut avec plus de 100 000 emplois.

Le besoin en électricité d’une raffinerie d’aluminium est l’ordre de 400 – 600 mégawatts soient ¾ de la production nationale de courant électrique en Guinée.

Cette industrialisation nécessite forcément la maitrise plusieurs préalables pour gagner ce pari et répercuter le bien-être sur la population.

La transformation en aluminium est très gourmande en mégawatt, la desserte en électricité de la population est de 40% avec une capacité installée de 1000 mégawatts. Il faut exploiter tout le potentiel hydroélectrique du pays et également recourir aux centrales à gaz qui peuvent être alimentés à partir du Sénégal (intégration sous régionale avec des oléoducs).

La volonté politique, les obligations de construction de raffinerie d’alumine existent dans les différentes conventions minières mais leur respect n’a jamais été à l’ordre du jour sauf avec les nouvelles autorités militaires, les seules exceptions étant Fria et le projet TBEA avec la construction du barrage hydroélectrique d’Amaria.

La formation des ingénieurs, des aides ingénieurs et des ouvriers, la transformation demande et exige une expertise de pointe dans l’ingénierie. Il faut créer 4 grandes écoles d’ingénieurs et rendre des ERAM (École Régionale des Arts et Métiers) opérationnelles.

Les coûts élevés de l’investissement d’une raffinerie qui sont de l’ordre de 2 milliards soient l’équivalent du budget de la Guinée. IL faut mettre en place des mesures incitatives fiscales pour attirer les investisseurs.

Comment monter au capital de ces investissements avec des Guinéens ? L’État à travers la SOGUIPAMI a 15% de participation gratuite dans les projets miniers et peut monter jusqu’à 35% au capital de ces sociétés en achetant des parts. Il faut encourager les nationaux pour prendre des actions afin d’augmenter des royalties pour le pays en mettant en place un mécanisme de financement entre les banques primaires, l’Etat et les investisseurs locaux.

Il faut également mettre en place un fond souverain guinéen qui pourra participer aux différents investissements et préparer l’après mine comme les Qataris et les Émiratis.

Avec la reprise de la croissance mondiale, après la pandémie de Covid 19, La demande mondiale de l’aluminium est vraiment favorable, nous sommes sur un bon cycle pour les gros investissements.

La Guinée et les autres pays producteurs de bauxite doivent également chercher à peser sur la transformation et la fixation des prix de ces matières en mettant en place des cartels. Les prochaines réflexions doivent être axées sur la fixation de la bauxite en francs guinéens comme la Russie avec son or noir. Il faut également limiter la production pour éviter les déséquilibres environnementaux comme en Indonésie.

Boubacar NABÉ

 Boubacar.nabe@gmail.com

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